L'interdiction de gérer: sanctions et conséquences pour les dirigeants d'entreprise
- kbennour
- 7 févr.
- 4 min de lecture
L’interdiction de gérer est une sanction qui peut être prononcée à l’encontre d’un dirigeant d’entreprise en raison de fautes de gestion graves. Cette mesure vise à protéger l’économie et les créanciers en empêchant une personne jugée irresponsable ou malhonnête de diriger ou de contrôler une société. Quels sont les motifs d’une interdiction de gérer ? Quelles en sont les conséquences ? Comment l’éviter ? Décryptage de cette sanction essentielle en droit des affaires.

1. Qu’est-ce que l’interdiction de gérer ?
L’interdiction de gérer est une sanction civile ou pénale qui empêche une personne d'exercer des fonctions de direction, d’administration ou de contrôle au sein d’une entreprise. Elle peut être prononcée dans plusieurs situations, notamment en cas de faillite frauduleuse, d’abus de biens sociaux ou de manquements graves aux obligations de gestion.
Textes légaux
L’interdiction de gérer est prévue par plusieurs textes du Code de commerce et du Code pénal :
Article L.653-8 du Code de commerce : prévoit l’interdiction de gérer à l’encontre des dirigeants d’entreprises en liquidation judiciaire ayant commis des fautes de gestion graves.
Article L.249-1 du Code de commerce : possibilité pour le tribunal de prononcer une interdiction de gérer en cas de non-respect des obligations comptables et de déclaration de cessation des paiements.
Article 131-27 du Code pénal : prévoit l’interdiction de gérer en cas de condamnation pour des infractions économiques et financières (abus de confiance, escroquerie, détournement de fonds).
2. Les motifs pouvant entraîner une interdiction de gérer
Un dirigeant peut être frappé d’une interdiction de gérer dans plusieurs situations, notamment :
2.1. En cas de procédure collective
Dans le cadre d’une liquidation judiciaire, le tribunal peut sanctionner un dirigeant s’il est reconnu coupable de fautes graves, telles que :
Avoir poursuivi une activité déficitaire de manière abusive, aggravant ainsi le passif de l’entreprise.
Avoir détourné des actifs de la société à des fins personnelles.
Avoir dissimulé la comptabilité ou frauduleusement retardé la déclaration de cessation des paiements.
Jurisprudence :Dans un arrêt du 19 mai 2021, la Cour de cassation a cassé une décision d'interdiction de gérer, au motif que l’interdiction ne peut porter que sur une entreprise commerciale, artisanale, agricole ou une personne morale, excluant ainsi les entreprises libérales. (Legifrance: https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000043566076 ).
2.2. En cas d’infractions pénales
Une interdiction de gérer peut être prononcée à l’encontre d’un dirigeant condamné pour des infractions pénales économiques, notamment :
L’abus de biens sociaux (article L.241-3 du Code de commerce).
L’escroquerie ou l’abus de confiance.
La fraude fiscale grave liée à l’exercice de la fonction de dirigeant.
Jurisprudence :Par un arrêt du 21 octobre 2020, la Cour de cassation a annulé une interdiction de gérer, faute d'avoir établi que l’usage des biens de la société avait été fait à des fins personnelles ou pour favoriser une autre entité. (Legifrance: https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000042486607)
2.3. En cas de non-respect des obligations légales
Un dirigeant peut être interdit de gérer s’il ne respecte pas certaines obligations légales, comme :
L’absence de convocation régulière des assemblées générales.
L’omission volontaire d’établir et de déposer les comptes annuels.
L’absence de tenue d’une comptabilité régulière.
Jurisprudence :Dans un arrêt du 17 avril 2019, la Cour de cassation a confirmé une interdiction de gérer pour absence de déclaration de cessation des paiements dans les délais légaux. (Legifrance: https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038488519/)
3. Les conséquences d’une interdiction de gérer
3.1. Une interdiction d’exercer des fonctions de dirigeant
Une personne frappée d’une interdiction de gérer ne peut plus exercer les fonctions de gérant, président, directeur général, administrateur ou entrepreneur individuel à responsabilité limitée.
3.2. Une inscription au casier judiciaire et aux registres officiels
L’interdiction de gérer est mentionnée sur le casier judiciaire et au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS), empêchant la création ou la reprise d’une entreprise.
3.3. Une responsabilité personnelle aggravée
Dans certains cas, l’interdiction de gérer peut s’accompagner d’une action en responsabilité financière.
Jurisprudence :Un dirigeant ayant poursuivi une activité déficitaire en connaissance de cause peut être condamné à supporter personnellement une partie des dettes de la société (Cass. com., 15 janvier 2020).
4. Comment éviter une interdiction de gérer ?
4.1. Respecter les obligations comptables et fiscales
Tenir une comptabilité à jour.
Déclarer la cessation des paiements dans les délais.
Payer les charges sociales et fiscales.
4.2. Adopter une gestion prudente et transparente
Ne pas mélanger les finances personnelles et professionnelles.
Ne pas dissimuler d’informations aux actionnaires et créanciers.
4.3. Se faire accompagner par des professionnels
Un expert-comptable pour une gestion rigoureuse.
Un avocat en droit des affaires pour prévenir les risques.
La jurisprudence a retenu que l’assistance d’un expert-comptable ou d’un avocat ne suffit pas à exonérer un dirigeant si ce dernier ne met pas en place les recommandations nécessaires.
Conclusion sur l'interdiction de gérer
L’interdiction de gérer est une sanction lourde qui peut impacter durablement la carrière d’un dirigeant. Pour l’éviter, il est essentiel d’adopter une gestion responsable et conforme aux obligations légales. En cas de difficultés, consulter un avocat en droit des affaires est recommandé.
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