Obligations convertibles, mesures conservatoires et sauvegarde accélérée : la Cour d’appel de Versailles précise les limites du référé en contexte de crise immobilière
- Kahina BENNOUR
- 11 juil.
- 2 min de lecture

Dans un arrêt du 30 janvier 2025, la Cour d’appel de Versailles (Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1 5, 30 janvier 2025, n° 24/03762) s’est prononcée sur la possibilité pour le représentant de la masse des porteurs d’obligations convertibles en actions (OCA) d’obtenir, en référé, des mesures conservatoires visant à interdire la cession d’actifs immobiliers et de titres sociaux par des sociétés en contexte de procédure de sauvegarde accélérée.
Contexte de l’affaire Le litige opposait le représentant de la masse des obligataires de plusieurs sociétés détenant des résidences services seniors (RSS) au groupe Orpéa, en difficulté financière et engagé dans un vaste plan de cession d’actifs immobiliers pour respecter ses engagements dans le cadre d’une procédure de sauvegarde accélérée. Craignant une dilution de la participation des obligataires à la suite d’augmentations de capital et d’opérations sociales contestées, le représentant de la masse a sollicité en référé l’interdiction de toute cession d’actifs ou de titres jusqu’à l’issue du contentieux au fond.
Décision de la Cour La Cour d’appel confirme d’abord l’intérêt à agir du représentant de la masse des obligataires, dès lors qu’il existe un différend sérieux sur la validité des décisions sociales affectant les droits des porteurs d’OCA. Toutefois, elle rappelle que les mesures conservatoires sollicitées doivent être proportionnées et ne pas porter une atteinte excessive aux droits des sociétés concernées, surtout lorsqu’elles sont engagées dans une procédure de sauvegarde accélérée impliquant des cessions d’actifs majeurs.
La Cour relève que l’urgence est caractérisée par le calendrier serré des cessions immobilières imposé par le plan de sauvegarde. Cependant, elle juge que les mesures d’interdiction demandées, qui auraient pour effet de bloquer une part significative du patrimoine immobilier du groupe pour une durée indéterminée, sont disproportionnées au regard des intérêts en présence. En effet, empêcher la réalisation des cessions compromettrait la restructuration financière du groupe Orpéa, ce qui pourrait in fine nuire aux intérêts mêmes des obligataires.
Enseignements à retenir Cet arrêt illustre la rigueur avec laquelle les juges du référé apprécient la proportionnalité des mesures conservatoires en contexte de crise et de procédures collectives. Même en présence d’un différend sérieux et d’une urgence avérée, la protection des droits des obligataires ne saurait justifier des mesures susceptibles de paralyser la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde, au risque d’aggraver la situation de l’ensemble des parties prenantes.
Pour les praticiens, cette décision rappelle l’importance de calibrer précisément les mesures sollicitées en référé, en tenant compte des impératifs de restructuration et de l’équilibre des intérêts en présence.



