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Droits des créanciers en cas d'adoption de plan de redressement judiciaire

  • Photo du rédacteur: Kahina BENNOUR
    Kahina BENNOUR
  • 19 oct.
  • 4 min de lecture

Lorsqu’une entreprise en difficulté est placée en redressement judiciaire, les créanciers craignent souvent de perdre le contrôle de la situation. Pourtant, la loi leur reconnaît certains droits d’information, de consultation et parfois d’opposition, selon qu’il s’agisse d’un plan de redressement (poursuite de l’activité par le débiteur) ou d’un plan de cession (reprise par un tiers).

Mais jusqu’où va réellement le droit de regard des créanciers ? Peuvent-ils influer sur le choix du repreneur ou sur le contenu du plan arrêté par le tribunal ?


Droit des créanciers en cas de plan de redressement judiciaire

1. Le rôle des créanciers dans la procédure de redressement judiciaire

Le redressement judiciaire, régi par les articles L.631-1 et suivants du Code de commerce, vise à permettre la poursuite de l’activité, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. Les créanciers ne sont pas de simples spectateurs : ils deviennent des acteurs de la procédure à travers plusieurs mécanismes.

Dès le jugement d’ouverture, ils sont invités à déclarer leurs créances (art. L.622-24 et s.) et peuvent participer au comité des créanciers (art. L.626-30 et s.), lorsqu’il est constitué.

Dans les entreprises d’une certaine taille, la procédure de redressement judiciaire prévoit la constitution de comités de créanciers conformément aux articles L.626-29 et suivants du Code de commerce. Ces comités ont pour mission de négocier et de se prononcer sur les propositions de règlement du passif contenues dans le projet de plan présenté par le débiteur ou par l’administrateur judiciaire. Ils se composent principalement de deux catégories : d’une part, le comité des établissements de crédit et assimilés, et d’autre part, le comité des principaux fournisseurs. Dans certains cas, un troisième comité regroupant les obligataires peut également être constitué. Chaque comité vote sur le projet de plan à la majorité des deux tiers des créances exprimées. Ce mécanisme favorise une approche collective et concertée entre le débiteur et les principaux créanciers, tout en permettant une validation rapide du plan lorsque le consensus est atteint. Lorsque les comités approuvent le plan, celui-ci s’impose à l’ensemble des créanciers relevant de la même catégorie, y compris ceux qui s’y sont opposés, renforçant ainsi la force contraignante du redressement.


2. Le plan de redressement : un équilibre entre intérêts du débiteur et des créanciers

Le plan de redressement (ou plan de continuation) est arrêté sur la base des propositions du débiteur, avec l’assistance de l’administrateur judiciaire. Ce plan fixe les modalités de règlement du passif, les perspectives d’exploitation et les engagements pris envers les salariés et les créanciers.

Les créanciers sont consultés avant l’adoption du plan. Selon la taille de l’entreprise, il peut exister des comités de créanciers (art. L.626-29) qui votent sur le projet de plan à la majorité des deux tiers, ou des consultations individuelles lorsque les comités ne sont pas constitués.

En tout état de cause, le tribunal de commerce demeure seul compétent pour arrêter le plan, même en cas d’opposition des créanciers majoritaires.



3. Le droit de regard des créanciers sur le repreneur et le plan de reprise

Lorsqu’un plan de cession est envisagé (articles L.642-1 et s. du Code de commerce), c’est-à-dire la vente totale ou partielle de l’entreprise à un repreneur, les créanciers n’ont pas un droit de veto, mais ils disposent de plusieurs droits de regard indirects : droit à l’information, droit d’expression et droit de recours.

L’administrateur judiciaire recueille et compare les offres de reprise. Les créanciers peuvent consulter le rapport d’évaluation des offres, qui précise les conditions de reprise et les conséquences sur le règlement du passif. Ils peuvent également présenter des observations au tribunal avant l’adoption du plan.

Une fois le plan adopté, ils disposent d’un droit d’appel dans un délai de dix jours à compter de la notification, pour contester la régularité ou le non-respect de leurs droits procéduraux.



4. Le tribunal, arbitre souverain de l’intérêt collectif

Le tribunal de commerce conserve un pouvoir souverain d’appréciation pour choisir entre les différentes offres et arrêter le plan de redressement ou de cession. Son rôle est de rechercher la solution la plus favorable à l’intérêt collectif des créanciers.

Le plan de continuation est privilégié lorsque la société est viable, tandis que le plan de cession est adopté lorsque la poursuite d’activité n’est possible qu’à travers une reprise par un tiers.



5. En pratique : des droits encadrés mais réels

Les créanciers ne sont pas exclus du processus de redressement : ils participent à la concertation, ont accès à une information complète et peuvent contester la régularité du plan adopté. Cependant, leur pouvoir reste limité : ils ne disposent ni d’un droit de veto sur le choix du repreneur, ni d’un pouvoir de décision sur les orientations économiques du plan.


À retenir sur les droits des créanciers en cas de plan de redressement judiciaire

Les créanciers sont consultés et peuvent être entendus, mais ne décident pas du plan de redressement ou du repreneur.

Leur droit de regard s’exerce par le biais du comité des créanciers, des observations au juge et du droit d’appel.

Le tribunal privilégie l’intérêt collectif, non les intérêts particuliers. L’assistance d’un avocat spécialisé en procédures collectives est essentielle pour défendre efficacement les droits des créanciers en cas de plan de redressement judiciaire.

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